C’est dans une bâtisse que l’on aurait pu qualifier de longère
de par sa forme que ma sœur est arrivée. Nous vivions alors dans cette maison
au milieu de la campagne bourguignonne, entouré de forêt, de champs et dont le
nombre de bovins surpassait au centuple le nombre d’habitants du coin. Nous
avions quelques voisins, dont un me rappelait en y repensant plus tard, le chasseur
dans « Rox et Rouky ». Notre environnement proche était vaste et une balançoire
avait fini par pousser non loin du grillage nous séparant du bois et un caniche
noir nommé Vladimir vagabondait au milieu d’une flore variée.
Revenons à cette nouvelle venue dans la famille. Cette petite
sœur, je ne sais plus comment elle est arrivée, je sais juste que je l’ai vu
grandir, passer d’un petit bébé se déplaçant à quatre pattes et à reculons (
elle n’a jamais rien voulu faire comme tout le monde ), dans les couloirs de la
maison, à une petite fille avec laquelle je me souviens avoir était plutôt proche.
Photos à l’appui, elle se retrouvait dans mon lit et je la tractais par le
biais d’une corde alors qu’elle s’installait sur l’un de mes camions. C’est à
cette époque je crois, que mon père lui avait donné le surnom de « souris ».
Petite touche humoristique, je n’ai jamais compris pourquoi petite elle n’avait
choisi pour doudou que les peluches qu’elle retirait de sa couverture et dont
elle en formait des boules, les plaçant au final sous le nez.
À cette période, j’allais à l’école maternelle. Le hameaux n’ayant
pas d’établissement scolaire, c’est le matin que, après avoir regardé mes
dessins-animés du type « tom et Jerry », j’allais prendre le car
bleu, où m’attendais Martine avec qui l’on partait pour un long voyage jusqu’à l’école.
École où j’ai connu une première amoureuse au doux nom d’Hélène, et où ma
maitresse me faisait penser à une indienne. Je me remémore d’ailleurs une fête
de l’école où nous étions tous de petits indiens. Quelques souvenirs de siestes
insupportables et d’endives froides et indigestes à la cantine refont également
surface alors que je repense à cette première véritable école. J’ai « étudié »
jusqu’au CE1 avant que l’on déménage à nouveau je crois. J’ai eu des copains à l’époque
( oui parce que ce ne fut plus tellement le cas un peu plus tard, mais nous y
reviendrons ). Je ne me souviens plus de leurs prénoms bien entendu, mais leurs
visages sont toujours gravés dans ma mémoires. Autre souvenir, celui d’une
balade en forêt avec ma classe, la bourgogne c’était vraiment pas mal pour ça.
L’automne était d’ailleurs propice aux cueillettes et
ramassages en tout genre, et puis on se promenait assez souvent en profitant de
la forêt avec mes parents. L’été j’allais même manger les groseilles qui
poussait naturellement sur notre terrain, j’en étais véritablement friand. Avec
ma sœur, aller jusqu’au garage situé plus en avant, était une véritable aventure
nous faisant pénétrer dans un tout nouvel univers qui sentait bon l’humidité.
Les pièces le constituant étant toute poussiéreuses et envahies de toiles d’araignée.
Non loin se trouvaient quelques arbres abritant une table en pierre avec de
petits promontoires permettant de s’asseoir autour. C’est ici que mon père
avait installé son hamac dans lequel nous adorions nous réfugier.
Le temps là-bas alternant entre chaleurs épuisantes et neiges
et gelés parfois abondantes, nous offrait également parfois des orages d’une
violence magistrale. Je me souviens d’un ciel noir au-dessus de ma tête alors
que j’étais sur la balançoire. J’avais refusé de rentrer à la maison, mais je
ne me suis pas fait prier pour y courir lorsque le premier coup de tonnerre
retentit. À côté de ça le merveilleux temps estivale laissait place à la venue
de la famille. Entre les grands parents, les oncles, les tantes, les cousins et
les cousines et autres grandes tantes et oncles, grands cousins/cousines nous
étions une joyeuse colonie. Les repas étaient festifs et les journées bien
remplies. J’ai revu d’ailleurs il y a quelques années une vidéo dévoilant l’une
de ces scènes magiques qui me restent en tête. L’on pouvait y voir nos parrains
respectifs à ma sœur et moi , eux étant encore bien jeunes à l’époque, s’octroyer
notre piscine gonflable sous mon pauvre regard de petit garçon perdu au milieu
de cette fougue à peine adulte se défoulant dans mon lieu d’amusement, j’ai
bien tenté de me faire entendre, mais rien n’aurait pu y faire, et ma grand-mère
semblant apprécier voir ses plus jeunes fils se dégourdir, me fit comprendre de
laisser faire. Je pense que ces moments font bel et bien partie des meilleurs
que j’ai pu vivre à ce jour, et je pense que je ne suis pas le seul à le
ressentir de la sorte.
J’allais oublier, plus que notre caniche, nous avions une
véritable ménagerie à Murlin. Entre le chat Mimine, le lapin de garenne Titus
que mes parents avaient récupéré ( j’ai tant pleuré lorsqu’il fut rendu à la
liberté ), les mandarins, le mouton malade et le poney agressif du voisin ami
de mon père et dont je m’étais amouraché de la fille ( un vrai tombeur à l’époque
), les chèvres que nous avons eu ensuite et surtout notre second chien, un
magnifique husky marron-blanc aux yeux vairons et à la truffe rose nommé Falco.
Ce jeune chien vigoureux m’a été donné par ma marraine. Il nous en fit voir de
toutes les couleurs, entre les fugues et son irrépressible instinct de chasse
qui se déclenchait dans les bassecours alentours ( même nos mandarins n’y ont
pas échappé, l’un aillant réussi à fuir, finit tout droit dans la gueule du
loup si je puis dire ), un chenil finit par être mis en place. Ô il n’y passait
pas toute sa vie, loin de là, mais le partageait avec Vladimir.
Des personnes auxquelles je pense souvent, monsieur et madame
Varin ( excusez pour l’orthographe, je pense ne l’avoir jamais connu ). Un
couple de très vieilles personnes qui me semblait d’une bonté sans bornes. Je me
suis retrouvé à plusieurs reprises chez eux et j’y ai toujours été bien reçu,
les gâteaux s’y offraient à moi petit gourmand que j’étais. J’étais le « poussin »
de madame.
C’est drôle de repenser qu’à l’époque tout me
paraissait être un périple, bien sur le voyage jusqu’à l’école, la découverte
de ma contré proche, la place du hameau, l’usine de fabrication de fromage de
chèvre, les balades jusqu’au bus abandonné dans la forêt, le parcours en
voiture jusqu’au magasin avec parfois un détour chez un artisan par lequel j’obtenais
des kinder surprise. Le monde qui entourait cette maison me semblait irréel et
magique, notamment avec la découverte du brame, moment mystérieux perdu dans le
temps. Ce monde magique cachait pourtant un côté bien plus sombre qui ne tarda
pas à faire surface. J’avais le sommeil en horreur, mais je vous en dirait plus
par la suite.